Une brève histoire du poème en prose

Objet d'étude : Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours

Problématique générale : Qu'est-ce qui distingue la poésie de la prose ?

Séance 01

Un rêve

Oral

Expliquez comment 'fonctionne' le texte ci-contre.

Pistes

Prolongement

Selon vous, quel est l'intérêt de ce texte ?

Un rêve

J'ai rêvé tant et plus, mais je n'y entends note.

Pantagruel, livre III.

Il était nuit. Ce furent d'abord, - ainsi j'ai vu, ainsi je raconte, - une abbaye aux murailles lézardées par la lune, - une forêt percée de sentiers tortueux, - et le Morimont1 grouillant de capes et de chapeaux.

Ce furent ensuite, - ainsi j'ai entendu, ainsi je raconte, - le glas funèbre d'une cloche auquel répondaient les sanglots funèbres d'une cellule, - des cris plaintifs et des rires féroces dont frissonnait chaque feuille le long d'une ramée, - et les prières bourdonnantes des pénitents noirs qui accompagnent un criminel au supplice.

Ce furent enfin, - ainsi s'acheva le rêve, ainsi je raconte, - un moine qui expirait couché dans la cendre des agonisants, - une jeune fille qui se débattait pendue aux branches d'un chêne, - et moi que le bourreau liait échevelé sur les rayons de la roue.

Dom Augustin, le prieur défunt, aura, en habit de cordelier2, les honneurs de la chapelle ardente ; et Marguerite, que son amant a tuée, sera ensevelie dans sa blanche robe d'innocence, entre quatre cierges de cire.

Mais moi, la barre du bourreau s'était, au premier coup, brisée comme un verre, les torches des pénitents noirs s'étaient éteintes sous des torrents de pluie, la foule s'était écoulée avec les ruisseaux débordés et rapides, - et je poursuivais d'autres songes vers le réveil.

Aloysius Bertrand, Gaspard de la nuit, 1842.s


1. Place des exécutions à Dijon.

2. Religieux de l'ordre de Saint François.

Séance 02

Les chevelures

Lecture

Préparez une lecture orale d'un des deux textes, au choix. Vous veillerez à ce que votre lecture soit correcte et expressive.

Oral

Quel texte avez-vous choisi ? Pourquoi ?

Explication

Vous commenterez le poème en prose en vous appuyant sur les axes suivants :

- un poème amoureux

- un voyage immobile

Pistes

Document A

Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !

Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !

Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure

Des souvenirs dormant dans cette chevelure,

Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !


La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,

Tout un monde lointain, absent, presque défunt,

Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !

Comme d'autres esprits voguent sur la musique,

Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.


J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,

Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ;

Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève !

Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve

De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :


Un port retentissant où mon âme peut boire

À grands flots le parfum, le son et la couleur ;

Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire,

Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire

D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.


Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse

Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ;

Et mon esprit subtil que le roulis caresse

Saura vous retrouver, ô féconde paresse,

Infinis bercements du loisir embaumé !


Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues,

Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond ;

Sur les bords duvetés de vos mèches tordues

Je m'enivre ardemment des senteurs confondues

De l'huile de coco, du musc et du goudron.


Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde

Sèmera le rubis, la perle et le saphir,

Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde !

N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde

Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?

C. Baudelaire, "La Chevelure" (extrait), in 'Spleen et Idéal', Les Fleurs du Mal, 1856.

Document B

Laisse-moi respirer longtemps, longtemps, l'odeur de tes cheveux, y plonger tout mon visage, comme un homme altéré dans l'eau d'une source, et les agiter avec ma main comme un mouchoir odorant, pour secouer des souvenirs dans l'air.

Si tu pouvais savoir tout ce que je vois ! tout ce que je sens ! tout ce que j'entends dans tes cheveux ! Mon âme voyage sur le parfum comme l'âme des autres hommes sur la musique.

Tes cheveux contiennent tout un rêve, plein de voilures et de mâtures ; ils contiennent de grandes mers dont les moussons me portent vers de charmants climats, où l'espace est plus bleu et plus profond, où l'atmosphère est parfumée par les fruits, par les feuilles et par la peau humaine.

Dans l'océan de ta chevelure, j'entrevois un port fourmillant de chants mélancoliques, d'hommes vigoureux de toutes nations et de navires de toutes formes découpant leurs architectures fines et compliquées sur un ciel immense où se prélasse l'éternelle chaleur.

Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues heures passées sur un divan, dans la chambre d'un beau navire, bercées par le roulis imperceptible du port, entre les pots de fleurs et les gargoulettes rafraîchissantes.

Dans l'ardent foyer de ta chevelure, je respire l'odeur du tabac mêlé à l'opium et au sucre ; dans la nuit de ta chevelure, je vois resplendir l'infini de l'azur tropical ; sur les rivages duvetés de ta chevelure je m'enivre des odeurs combinées du goudron, du musc et de l'huile de coco.

Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand je mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je mange des souvenirs.

C. Baudelaire, 'Un hémisphère dans une chevelure', in Le Spleen de Paris, 1869.

Proposition

1. Placez chacun des exemples suivants dans la partie qui correspond.

a. "Laisse-moi respirer longtemps, longtemps, l'odeur de tes cheveux, y plonger tout mon visage"

b. "tes cheveux", "ta chevelure", "tes tresses"

c. "la nuit de ta chevelure", "tes tresses lourdes et noires", "tes cheveux élastiques et rebelles"

2. Proposez pour chaque exemple une analyse.

3. Rédigez, au choix, l'un des paragraphes.

I. Un poème amoureux

Ce poème nous plonge dans l'intimité d'un couple

Dialogue entre le poète et sa maîtresse.

Il s'inscrit dans le genre du blason

Tout le poème est consacré aux cheveux de la femme aimée.

De nombreux phénomènes d'écho et de reprises organisés autour des cheveux.

Séance 03

Des images surprenantes

Observation

Choisissez l'un des deux documents et expliquez ce qui vous parait intéressant.

Pistes

Notion : le surréalisme

Explication

Vous analyserez le texte de Lautréamont en vous appuyant sur le parcours de lecture suivant :

- une rue parisienne

- un promeneur solitaire

- un étrange narrateur

Document A

Le jeune Isidore Ducasse prend comme pseudonyme Le Comte de Lautréamont pour raconter, à travers d'étranges textes, l'histoire d'un héros malfaisant, Maldoror.

Les magasins de la rue Vivienne étalent leurs richesses aux yeux émerveillés. Éclairés par de nombreux becs de gaz, les coffrets d'acajou et les montres en or répandent à travers les vitrines des gerbes de lumière éblouissante. Huit heures ont sonné à l'horloge de la Bourse : ce n'est pas tard ! À peine le dernier coup de marteau s'est-il fait entendre, que la rue, dont le nom a été cité, se met à trembler, et secoue ses fondements depuis la place Royale jusqu'au boulevard Montmartre. Les promeneurs hâtent le pas, et se retirent pensifs dans leurs maisons. Une femme s'évanouit et tombe sur l'asphalte. Personne ne la relève : il tarde à chacun de s'éloigner de ce parage. Les volets se referment avec impétuosité, et les habitants s'enfoncent dans leurs couvertures. On dirait que la peste asiatique a révélé sa présence. Ainsi, pendant que la plus grande partie de la ville se prépare à nager dans les réjouissances des fêtes nocturnes, la rue Vivienne se trouve subitement glacée par une sorte de pétrification. Comme un cœur qui cesse d'aimer, elle a vu sa vie éteinte. Mais, bientôt, la nouvelle du phénomène se répand dans les autres couches de la population, et un silence morne plane sur l'auguste capitale. Où sont-ils passés, les becs de gaz ? Que sont-elles devenues, les vendeuses d'amour ? Rien… la solitude et l'obscurité ! Une chouette, volant dans une direction rectiligne, et dont la patte est cassée, passe au-dessus de la Madeleine, et prend son essor vers la barrière du Trône, en s'écriant : "Un malheur se prépare". Or, dans cet endroit que ma plume (ce véritable ami qui me sert de compère) vient de rendre mystérieux, si vous regardez du côté par où la rue Colbert s'engage dans la rue Vivienne, vous verrez, à l'angle formé par le croisement de ces deux voies, un personnage montrer sa silhouette, et diriger sa marche légère vers les boulevards. Mais, si l'on s'approche davantage, de manière à ne pas amener sur soi-même l'attention de ce passant, on s'aperçoit, avec un agréable étonnement, qu'il est jeune ! De loin on l'aurait pris en effet pour un homme mûr. La somme des jours ne compte plus, quand il s'agit d'apprécier la capacité intellectuelle d'une figure sérieuse. Je me connais à lire l'âge dans les lignes physiognomoniques du front : il a seize ans et quatre mois ! Il est beau comme la rétractilité des serres des oiseaux rapaces ; ou encore, comme l'incertitude des mouvements musculaires dans les plaies des parties molles de la région cervicale postérieure ; ou plutôt, comme ce piège à rats perpétuel, toujours retendu par l'animal pris, qui peut prendre seul des rongeurs indéfiniment, et fonctionner même caché sous la paille ; et surtout, comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie !

Lautréamont, Les Chants de Maldoror, VI, 1869.

Document B

Le peintre Max Ernst réalise ce roman-collage en puisant dans des gravures issues de romans populaires illustrés, de journaux de sciences naturelles ou encore de catalogues de vente du XIXe siècle.

Max Ernst, Une semaine de bonté, 1934.

Séance 04

L'Huître

Observation

Qu'est-ce qui vous paraît intéressant dans ce tableau ?

Jean Siméon Chardin, La Raie, 1728.

Lecture

À partir du texte de Ponge, faites un dessin de l'huître.

Pistes

L'huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C'est un monde opiniâtrement clos. Pourtant on peut l'ouvrir : il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau ébréché et peu franc, s'y reprendre à plusieurs fois. Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles : c'est un travail grossier. Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de halos.

A l'intérieur l'on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d'en dessus s'affaissent sur les cieux d'en dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l'odeur et à la vue, frangé d'une dentelle noirâtre sur les bords.

Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d'où l'on trouve aussitôt à s'orner.

Francis Ponge, L'Huître, Le parti pris des choses, 1942, coll. Poésie/Gallimard, éd. Gallimard.

Explication

Vous étudierez le poème de Ponge en vous appuyant sur les questions suivantes. Pour chaque question, on attend une idée directrice, des éléments d'explication, une citation, et pour chaque citation, une analyse et une interprétation.

I. Ce poème propose une nature morte

1. Montrez que l'huître est une chose ordinaire.

2. Le narrateur est-il impliqué dans le texte ?

II. Le texte décrit l'huître de façon très précise

1. Comment l'extérieur de l'huître est-il décrit ?

2. Même question pour l'intérieur de l'huître.

III. Le genre et la visée de ce texte sont problématiques

1. De quels genres peut-on rapprocher ce texte ?

2. Comment comprenez-vous la dernière phrase du texte ?

Réflexion

À propos de Chardin, Ponge écrit : "Entreprenez de traiter de la façon la plus banale le plus commun des sujets : c'est alors que paraîtra votre génie."

Selon vous, la poésie la plus intéressante est-elle celle qui traite "de la façon la plus banale le plus commun des sujets" ?

Pistes

Évaluation

Entre terre et mer

Lecture

Document A

Un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie. L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux sans jamais les lasser. Les formes élancées des navires, au gréement compliqué, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent à entretenir dans l'âme le goût du rythme et de la beauté. Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n'a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir.

C. Baudelaire, 'Le Port', in Le Spleen de Paris, 1869.

Document B

Des ciels gris de cristal. Un bizarre dessin de ponts, ceux-ci droits, ceux-là bombés, d'autres descendant ou obliquant en angles sur les premiers, et ces figures se renouvelant dans les autres circuits éclairés du canal, mais tous tellement longs et légers que les rives, chargées de dômes, s'abaissent et s'amoindrissent. Quelques-uns de ces ponts sont encore chargés de masures. D'autres soutiennent des mâts, des signaux, de frêles parapets. Des accords mineurs se croisent et filent, des cordes montent des berges. On distingue une veste rouge, peut-être d'autres costumes et des instruments de musique. Sont-ce des airs populaires, des bouts de concerts seigneuriaux, des restants d'hymnes publics ? L'eau est grise et bleue, large comme un bras de mer. - Un rayon blanc, tombant du haut du ciel, anéantit cette comédie.

Arthur Rimbaud, Les Ponts, Illuminations, 1886 (textes rédigés entre 1872 et 1875).

Document C

La zone, où est venu s'arrêter ce trois-mâts encalminé, merveilleusement, totalement blanc, si blanc que c'est fou d'être aussi blanc, est immense et déserte.

N'importe le vent ou l'absence de vent ou la menace de vent, le trois-mâts qui ne veut pas changer ne dégrée pas. Grêle, mais qui ne se rend pas, surtout pas à l'évidence, surtout pas à celle des variations du réel, le voici qui, à force de ne pas se rendre, a abouti dans un espace où plus rien ne bouge, où c'est depuis longtemps la mort de toute brise. Et pas de retour en arrière possible.

N'y a t'il plus rien d'autre, ni personne nulle part ?

Si. Au loin quelques plis soulevés de la multiforme étoffe des cinq mondes montrent, serrées, en rang, à l'affût, les faces équivoques des "autres".

Menaçantes ? Envieuses ? Plutôt hors de portée, toutes précautions prises.

Dans le calme absolu, où pas une risée, jamais, ne passe, le trois-mâts vierge, qui ne cargue pas ses voiles immaculées, demeure préservé des souillures sous un irréprochable ciel de glace.

Henri Michaux, 'La Zone', Chemins cherchés Chemins perdus Transgressions, éd. Gallimard, 1981.

Depuis un mois que j'habitais Honfleur, je n'avais pas encore vu la mer, car le médecin me faisait garder la chambre.

Mais hier soir, lassé d'un tel isolement, je construisis, profitant du brouillard, une jetée jusqu'à la mer.

Puis, tout au bout, laissant pendre mes jambes, je regardai la mer, sous moi, qui respirait profondément.

Un murmure vint de droite. C'était un homme assis comme moi, les jambes ballantes, et qui regardait la mer. "A présent, dit-il, que je suis vieux, je vais en retirer tout ce que j'y ai mis depuis des années." Il se mit à tirer en se servant de poulies.

Et il sortit des richesses en abondance. Il en tirait des capitaines d'autres âges en grand uniforme, des caisses cloutées de toutes sortes de choses précieuses et des femmes habillées richement mais comme elles ne s'habillent plus. Et chaque être ou chaque chose qu'il amenait à la surface, il le regardait attentivement avec grand espoir, puis sans mot dire, tandis que son regard s'éteignait, il poussait ça derrière lui. Nous remplîmes ainsi toute l'estacade. Ce qu'il y avait, je ne m'en souviens pas au juste, car je n'ai pas de mémoire mais visiblement ce n'était pas satisfaisant, quelque chose en tout était perdu, qu'il espérait retrouver et qui s'était fané.

Alors, il se mit à rejeter tout à la mer.

Un long ruban ce qui tomba et qui, vous mouillant, vous glaçait.

Un dernier débris qu'il poussait l'entraîna lui-même.

Quant à moi, grelottant de fièvre, comment je pus regagner mon lit, je me le demande.

Henri Michaux, La Jetée, in Mes propriétés, L'Espace du dedans, 1944 puis 1966, coll. Poésie/Gallimard, éd. Gallimard.

Annexe

J.M.W. Turner, View of Lyons, 1846, Tate Gallery

Atelier

L'écriture surréaliste

Observation

Quels points communs pouvez-vous mettre en évidence entre les procédés évoqués ci-contre ?

Pistes

Écriture

Choisissez le principe d'une de ces formes d'écriture et utilisez-le pour écrire un texte.

Exemples

Saisir la balle au bond.

À quelque chose malheur est bon.

une alouette ne fait pas le printemps

Sourd comme un pot.

L'habit ne fait pas le moine.

L'herbe est toujours plus verte ailleurs.

Tout ce qui brille n'est pas de l'or.

C'est dans les vieilles marmites qu'on fait les meilleures soupes.

L'argent ne se trouve pas sous le sabot d'un cheval.

On ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs.

Pour faire un poème dadaïste

Prenez un journal.

Prenez des ciseaux.

Choisissez dans ce journal un article ayant la longueur que vous comptez donner à votre poème.

Découpez l'article.

Découpez ensuite avec soin chacun des mots qui forment cet article et mettez-les dans un sac.

Agitez doucement.

Sortez ensuite chaque coupure l'une après l'autre.

Copiez consciencieusement dans l'ordre où elles ont quitté le sac.

Le poème vous ressemblera.

Et vous voilà un écrivain infiniment original et d'une sensibilité charmante, encore qu'incomprise du vulgaire.

Tristan Tzara, Les Sept manifestes Dada (1924), dans Data est tatou. Tout est dada, éd. GF-Flammarion.

Le cadavre exquis

Le cadavre - exquis - boira - le vin - nouveau.

Le mille-pattes amoureux et frêle rivalise de méchanceté avec le cortège languissant.

La vapeur ailée séduit l'oiseau fermé à clé.

Le Surréalisme au service de la révolution, 1930-1933.

152 proverbes mis au goût du jour

5. Il faut rendre à la paille ce qui appartient à la poutre.

39. Qui s'y remue s'y perd.

63. Saisir la malle du blond.

86. A quelque rose chasseur est bon.

111. Un albinos ne fait pas le beau temps.

112. Tout ce qui vole n'est pas rose.

123. Sourd comme l'oreille d'une cloche.

Paul Eluard, 152 proverbes mis au goût du jour en collaboration avec Benjamin Péret, 1925.

L'écriture automatique

Faites-vous apporter de quoi écrire, après vous être établi en un lieu aussi favorable que possible à la concentration de votre esprit sur lui-même. Placez-vous dans l'état le plus passif, ou réceptif, que vous pourrez. Faites abstraction de votre génie, de vos talents et de ceux de tous les autres. Dites-vous bien que la littérature est un des plus tristes chemins qui mènent à tout. Écrivez vite sans sujet préconçu, assez vite pour ne pas retenir et ne pas être tenté de vous relire. La première phrase viendra toute seule, tant il est vrai qu'à chaque seconde il est une phrase étrangère à notre pensée consciente qui ne demande qu'à s'extérioriser. Il est assez difficile de se prononcer sur le cas de la phrase suivante ; elle participe sans doute à la fois de notre activité consciente et de l'autre, si l'on admet que le fait d'avoir écrit la première entraîne un minimum de perception. Peu doit vous importer, d'ailleurs ; c'est en cela que réside, pour la plus grande part, l'intérêt du jeu surréaliste. Toujours est-il que la ponctuation s'oppose sans doute à la continuité absolue de la coulée qui nous occupe, bien qu'elle paraisse aussi nécessaire que la distribution des nœuds sur une corde vivante. Continuez autant qu'il vous plaira. Fiez-vous au caractère inépuisable du murmure.

A. Breton, Manifeste du surréalisme, 1924.

Invention

En vous inspirant des techniques utilisées dans un ou plusieurs des poèmes en prose étudiés, écrivez, à votre tour, un poème en prose.

Vous pouvez écrire seul ou à deux.

À mi parcours, vous échangerez votre texte avec un autre élève/groupe, et vous rédigerez des conseils pour qu'il/s puisse/nt améliorer son/leur texte.

Vous rendrez la version intermédiaire, les conseils donnés, et la version finale.

Éléments restrictifs

Une copie ne peut atteindre la moyenne si l'un des éléments suivants est présent : la consigne n'est pas du tout respectée (absence de rapport avec le sujet ou contresens sur lui) / le devoir ne présente aucune recherche dans son écriture / le devoir n'est pas compréhensible en plusieurs endroits / le devoir est très court.

Les conseils de ...
/4 1 2 3 4
Lire, analyser, interpréter

Un conseil est formulé.

Plusieurs conseils sont formulés.

Les conseils donnés sont adaptés à l'ébauche proposée.

Les conseils sont variés et s'appuient sur une analyse fine de l'ébauche proposée.

Construire un jugement argumenté

Les conseils sont compréhensibles.

Les conseils donnés sont clairs.

Les conseils sont précis et indiquent des pistes concrètes d'amélioration.

Le texte de ...
/16 De 1 à 4 De 5 à 8 De 9 à 12 De 13 à 16
Exercer sa faculté d'invention de façon raisonnée

Au moins un élément de la consigne est pris en compte.

Plusieurs éléments de la consigne sont pris en compte (genre, visée).

Le sujet est compris et la consigne est respectée (genre, visée).

L'invention esquisse une fiction crédible.

Une intention poétique est perceptible.

Les enjeux du sujet sont bien compris et la consigne respectée (genre, visée, registre).

L'invention met en place une fiction riche et cohérente.

Le texte est inventif dans son écriture et manifeste une recherche poétique.

Lire, analyser, interpréter

L'invention s'appuie sur une lecture correcte du texte/du corpus.

L'invention s'appuie sur une lecture pertinente du texte/du corpus.

L'invention s'appuie sur une lecture fine et personnelle du texte/du corpus.

Maîtriser la langue et l'expression

La langue est partiellement maîtrisée.

La langue est correctement maîtrisée.

Les titres d'oeuvre sont soulignés.

La langue est bien maîtrisée.

Les titres d'oeuvre sont soulignés.

Le vocabulaire est précis et varié.